Quelles sont les relations entre politiques et Média ?
"Quelles sont les relations entre politiques et Média ?"
Question d'actualité s'il en est en cette période électorale. Les citoyens imaginent souvent une grande connivence entre les journalistes et les politiques. Il est souvent question d'instrumentalisation des uns par les autres et réciproquement. "Mythe ou réalité ?" Telle était la question auquel s'exerçait à répondre le module de l'Université populaire de Bondy du 14 février.
Réalisé dans le cadre du cursus "Médias et démocratie" ce module était animé par Christine Menzaghi, directrice de la communication de la Ligue de l'enseignement. Quatre intervenants se sont déplacés pour faire profiter les auditeurs de leur expérience sur le sujet :
- Clémentine Autain femme politique, ancienne directrice de rédaction du mensuel Regards et productrice à France Culture.
- Gilles Garnier, élue à noisy le sec et vice président du Conseil général de Seine Saint Denis.
- Bernard Loche, journaliste, rédacteur en chef à France 3 et producteur des reportages "Saga-Cités"
- Sylvine Thomassin, maire de Bondy.
Les intervenants ont pris tour à tour la parole pour répondre à la problématique du module, puis il ont répondu aux questions des participants brossant ainsi un portrait de l'univers des médias nationaux et des leurs relations avec le monde politique. Ils ont ainsi produit l'image d'un univers du journalisme qui s'appauvrit.
Une précarisation et une paupérisation du métier
La qualité du travail journalistique s'amenuise pour de nombreuses raisons : la première c'est la précarisation du métier. "Il y a une paupérisation de la formation et du travail journalistique. Les rédactions se réduisent. Il y a un manque de temps et d'argent pour du journalisme de qualité", déclare Clémentine Autain.
Bernard Loche explique que le temps et l'argent sont des facteurs déterminants dans les médias d'aujourd'hui. "Il est demander au journaliste de décrire de plus en plus vite un monde de plus en plus complexe. Du coup il manque de temps pour travailler sérieusement. Si on décrit des évènements banals tels que le froid c'est parce que c'est moins compliqué, moins long et demande moins d'argent que de faire du vrai journalisme d'investigation.[...] La logique de casting remplace la logique d'investigation".
Connivence ou proximité ?
Les quatre intervenants ont précisé que si les relations entre représentants des médias et hommes politiques étaient parfois proches, cela était normal car un bon journaliste est toujours proche de son sujet. "Il ne faut pas confondre proximité et connivence. La connivence toutefois existe mais plutôt parmi l'élite journalistique - même si je n'aime pas ce terme d'élite - qui vivent dans le même cercle que les hommes politiques, ont fréquenté les même écoles et vont aux mêmes soirées" précise Bernard Loche. "Par ailleurs la proximité et la connivence ne sont pas des nouveautés, dans l'histoire de nombreux hommes politiques ont accédé à leur fonction grâce à leur position de journaliste" ajoute Clémentine Autain. " Les journalistes font partie du monde politique, ils produisent du politique".
Une relation parfois conflictuelle
Par ailleurs la posture de politique face aux journalistes n'est pas toujours évidente non plus. Clémentine Autain critique par exemple les émissions qui mêlent divertissements et informations ("infotainment"), particulièrement difficiles pour les politiques. Composition du plateau, cadrage serré, organisation de l'interview inattendue... autant d'outils qui sont souvent défavorables et désagréables aux politiques. Toutefois, c'est un lieu qui leur est indispensable, non seulement il leur permet d'afficher leur présence sur la scène politique mais aussi de diffuser un message auprès de personnes qu'ils n'ont pas l'habitude de joindre. Raisons pour lesquelles certains politiques continuent de se rendre dans ces émissions malgré leur agacement à l'encontre de celles ci.
"Parfois on est dans les cordes, mais d'autre fois c'est le politique qui crée l'évènement., surtout avec les réseaux sociaux d'aujourd'hui." ajoute Gilles Garnier
La maire de Bondy affirme tout de même "Il y a une responsabilité des politiques aussi, qui doivent savoir dire non à certaines questions et développer la vision à long termes dans les médias".
"Il faut rendre au journaliste sa véritable indépendance, qui ne passe ni par la caricature, ni par l'immédiateté."
Bernard Loche affirme qu'aujourd'hui il y a un sursaut, un désir de changement.
"Les journalistes, en particulier ceux qui forme la base fragilisée, attendent que ce problème soit mis en lumière sans que la faute en retombe exclusivement sur leur corps de métier. [...] Il faut une presse pluraliste, car obtenir une presse pluraliste, c'est avoir une presse indépendante."
Cristine Menzaghi souligne en conclusion que ce problème nécessite que la population cesse de rester bloquée dans une posture passive et statique, attendant une action des politiques ou que la situation se dénoue seule. C'est par l'action des citoyens que la situation peut changer.
Le prochain module de l'université populaire de Bondy aura lieu le Mardi 20 Mars, la liste des séance est consultable ici.